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Droits du conjoint survivant en droit français.

L’étendue des droits du conjoint survivant dépend des héritiers avec lesquels il vient en concours à la succession du défunt.

Ainsi, en cas d’enfants communs seulement, une option est laissé au conjoint sur ses droits dans la succession (usufruit de l’ensemble de la succession ou 1/4 en pleine propriété), ce qui n’est déjà plus le cas en cas d’enfant d’un autre lit, limitant ses droits à 1/4 de la pleine propriété de la succession.

Afin de permettre au conjoint de protéger plus son époux(se), la loi française permet de réaliser une donation entre époux (taux entre 5 et 45 % avec abattement de 80724 €) ou encore de rédiger un testament.

Taxation

Au niveau fiscal, le conjoint survivant est exonéré des droits de succession.

Quant aux enfants, la taxation est comprise entre 5 et 45% (taux progressif) avec un abattement de 100.000 € en faveur de chaque enfant.

Ainsi, vous l’aurez compris, les droits du conjoint survivant dans la succession de son conjoint prédécédé ne seront peut-être pas ceux qu’ils souhaitaient (trop de charges ou inutile, droit d’usufruit, indivision…).  D’autre part, le conjoint survivant souhaite peut-être faire bénéficier directement la génération suivante, du bénéfice de certains biens de la succession.

Faculté de cantonnement

Ainsi, l’article 1094-1 du Code civil français permet au conjoint survivant de limiter son émolument sur certains biens dont il est bénéficiaire dans la succession.  Cette faculté est également offerte à tout légataire (article 1002-1 Du code civil français) à condition que la succession ait été acceptée par un héritier désigné par la loi.

Quant au conjoint survivant, il suffit que le conjoint survivant ait fait l’objet d’une libéralité de la part de son conjoint par donation (même si celle-ci n’avantagerait pas plus le conjoint survivant) ou testament.  D’autre part, le défunt ne doit pas avoir interdit cette possibilité (par exemple il peut l’avoir fait pour éviter la pression des enfants sur le conjoint survivant)

Il s’agit donc d’une possibilité laissée au conjoint survivant, lui permettant ainsi de « gérer » lui-même les biens recueillis dans la succession de son conjoint prédécédé. Cette décision est partant irrévocable.

La conséquence au niveau fiscal n’est pas des moindres étant donné que le cantonnement n’est pas considéré comme une libéralité.  Ainsi, il ne sera pas l’objet de rapport ou de réduction dans la succession de celui qui exerce le cantonnement.

Objectifs

Plusieurs objectifs peuvent être tirés de cette faculté:

  • éviter le droit de partage même si le cantonnement porte sur un ou plusieurs biens déterminés (alors que celui-ci est dû au taux de 2,5%/ 1,10 % lors du partage de la succession)
  • avantager les beaux-enfants sans taxation importante (60% en droit de donation entre tiers)
  • optimiser fiscalement la transmission directement aux enfants sur les deux successions en doublant les tranches d’imposition et les abattements
  • éviter une sortie d’un bien de famille
  • afin d’éviter de devoir supporter l’action en réduction d’héritier réservataire, en tant que légataire universel
  • permettre le démembrement de propriété et limiter l’émolument à l’usufruit, permettant alors la transmission sans taxation au décès de l’usufruitier

ET EN DROIT BELGE ?

Force est de constater que cette faculté n’a pas été prévue par notre législateur.

Seule la clause d’attribution optionnelle pourrait faire, à mon sens, l’objet d’une comparaison mais toute limitée, celle-ci étant liée au contrat de mariage de communauté.

D’autre part, les conséquences fiscales ne sont pas les mêmes et vu l’absence de taxation du conjoint survivant en droit français, les enjeux sont différents.

Enfin, rien de comparable n’est prévu pour tout tiers légataire.

Evolution avec l’assurance-vie…

En droit des assurances, le dénouement du contrat d’assurance vie et le versement des capitaux aux héritiers bénéficiaires sont normalement taxables en fonction de la fiscalité dérogatoire de l’assurance vie :

– L’article 990 I du code général des impôts prévoit, pour les sommes versées avant les 70 ans de l’assuré, une exonération jusqu’à 152.500€ par bénéficiaire puis une taxation de 20% jusqu’à 700 000€ et 31.25% au-delà ;

– L’article 757 B du code général des impôts prévoit une taxation aux droits de succession pour les primes versées après les 70 ans de l’assuré après un abattement global (=un abattement pour l’ensemble des bénéficiaires) de 30.500 euros.

Or, depuis le 1er janvier 2016, la faculté de cantonnement est également intéressante lorsqu’elle se combine à une assurance-vie non dénouée souscrite par le conjoint survivant au moyen de fonds communs.

La réponse ministérielle CIOT a précisé que dans un contrat d’assurance-vie souscrit avec des fonds communs et non dénoué à la date du décès de l’époux bénéficiaire du contrat, 50% de la valeur de rachat de ce type de contrat rentre dans l’actif de la succession (en droit civil) mais n’est plus taxé !

Dès lors, combiné à la faculté de cantonnement, les héritiers ne seront plus taxés si le conjoint abandonne ses droits sur la valeur de rachat en exerçant ses droits au cantonnement.

La valeur de rachat est ainsi transmise aux héritiers de l’époux prédécédé et ce, sans taxation étant donné que cette valeur de rachat ne constitue plus un élément de l’actif successoral pour le calcul des droits de mutation dus par les héritiers de l’époux prédécédé !

Si par contre, le conjoint exerce le cantonnement sur l’assurance-vie, il en devient pleinement propriétaire à 100%, et ce, à nouveau sans taxation en droit de succession !

Et la saga n’est pas finie, le congrès annuel des notaires qui se déroulera fin de l’année 2022, prévoit de revoir la copie de ce bel instrument, en vue de l’améliorer encore et encore…

En Belgique, suite au décret du 22.12.2021, la région de Bruxelles et la Wallonie se sont alignées sur ce qui est pratiqué par la Flandres (article 2.7.1.0.6 §1er VCF) en ce qui concerne la taxation des contrats d’assurances-vie souscrits sur la tête des deux conjoints (généralement contrat AB- AB-C), à savoir le fait que la taxation est payée au moment seulement de la perception de la prestation  soit par le preneur d’assurance survivant en cas de rachat par ce dernier, soit par le bénéficiaire en cas de décès.

L’article 8 du code des droits de succession étant modifié actuellement, la taxation est applicable dans le cadre du rachat par le conjoint survivant.

Cela réduit malheureusement l’intérêt du contrat d’assurance-vie en tant qu’instrument de planification successorale, contrairement à la France…

A suivre…

www.avocatdemarque.be